Un monde où tout le monde il est beau…
Dans les commentaires récents, j’ai eu cette phrase qui m’a sacrément interpellé :
Si je dois choisir entre un monde où tout le monde est beau, tout le monde est gentil et un monde où tout le monde est laid et méchant, je prends le premier, sans hésiter.
Il faut replacer un peu dans le contexte pour comprendre. Dans mon billet « concert de louanges », je déplorais ce côté souvent observable des blogs qui consiste à se joindre aux concerts de louanges sur les personnalités encensées par les médias dominants et surtout à coller à un conformisme ambiant très prégnant. Les blogs, c’est vrai, c’est un peu l’univers du tout à l’ego, et chacun veut y offrir une image très positive de lui. C’est normal et c’est humain. Je maintiens que le conformisme ambiant, c’est tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil.
Bien entendu, moi aussi, si j’avais à choisir, je choisirais le monde où tout le monde il est beau et gentil. Et je crois que tout le monde ferait pareil, c’est évident. Personne, entre le bonheur et le malheur, ne choisirait le malheur !
N’empêche que je n’ai pas à choisir, et c’est peut-être heureux, d’ailleurs… Parce qu’il y a fort à parier qu’un monde où tout le monde serait beau et gentil serait un monde totalitaire (Relire le meilleur des mondes par exemple) ; mais cela, c’est un autre débat.
Pour se convaincre que le monde dans lequel on vit est loin d’être un monde peint en rose, il suffit de lire les journaux, d’écouter la radio, de regarder un journal télévisé.
Est-ce que l’humanité qu’on voit impliquée dans les pires meurtres, dans les pires actions, dans la dénégation constante de la liberté des autres, est une humanité différente de celle qui s’exprime dans les blogs, où tout le monde affiche de beaux et bons sentiments ? Je ne le crois pas : il y a une seule humanité et dans chaque homme, le meilleur et le pire se côtoient. Le problème, c’est que les gens affichent toujours des intentions magnifiques. Alors, les vrais problèmes ne peuvent plus se discuter. Et je suis toujours frappé du décalage entre l’image que l’on a de quelqu’un que l’on connaît superficiellement et celle que l’on découvre lorsque l’on vit seulement quelques jours avec lui, au quotidien.
Les gens veulent toujours donner une image idéale d’eux, une image qui n’est pas eux, et, lorsqu’on les côtoie dans l’intimité, on a l’impression que malheureusement, beaucoup ne gagnent pas à être connus. Et peut-être, s’il y avait moins de « prêt à penser » ambiant, si les gens osaient plus dire ce qu’ils croient vraiment et non ce qu’il faut croire, alors on aurait moins de déconvenues ensuite.
Et puis, il faut reconnaître que ce qu’on aime dans les histoires, c’est quand il y a du drame, du sang, de la jalousie, des rivalités…
Que serait l’histoire de Roméo et Juliette si Roméo avait aimé Juliette, si leurs parents avaient été d’accord pour les unir, si les deux familles s’étaient aimées, dans la plus parfaite harmonie, s’ils avaient eu beaucoup d’enfants et si leur vie avait été un long fleuve tranquille ? Est-ce qu’il y aurait eu une histoire ? Aurait-elle eu la moindre chance d’intéresser quelqu’un ?
En revanche, si le drame de Shakespeare fait partie des grands mythes de l’humanité, c’est parce que Roméo et Juliette étaient issus de familles ennemies, parce que Roméo a tué le frère de Juliette, parce qu’il a été banni, parce que pour tenter de préserver leur amour contre tous, Juliette a simulé la mort… Mais Roméo croyant qu’elle était morte se suicida et Juliette, comprenant l’horrible méprise, se suicida à son tour.
Tout ça pour dire qu’on ne peut pas toujours jouer à l’autruche. Regardons autour de nous comment marche vraiment le monde.
Et si un proverbe résumait bien tout cela, ce pourrait être : il ne faut pas se fier aux apparences…