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Pierre d'écriture
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31 mars 2006

Quel film !

Texte écrit pour Coïtus Impromptus...

Quel film !

Trois heures cinquante de pur bonheur !

Une véritable expérience esthétique de communion avec un univers exigeant, austère et délicat, perceptif et intimiste, un voyage dans l’introspection d’une âme tourmentée. C’est tout à la fois une pièce de Xenakis, une œuvre baroque, décalée, parsemée de quelques touches de néoconstructivisme et teintée de land’art dans l’inconscient d’un paysage fantomatique d’une banlieue aux contours incertains…
Dès que les premières images apparaissent sur l’écran, la vie s’arrête, le temps est suspendu… Images en noir et blanc d’une incroyable pureté, d’un dénuement encore jamais atteint à ce niveau d’exception. Là où certains pourraient ne voir que vide et culte du néant, le spectateur averti, le véritable cinéphile reconnaîtra le foisonnement de la vie dans tout ce que l’absence de vie et de mouvement peut justement manifester de vibration nucléaire…
L’histoire est simple jusqu’au dépouillement le plus absolu : un seul personnage, dans une seule pièce, blanche, vide, sans le moindre meuble, sans le moindre accessoire qui pourrait distraire l’attention du spectateur.

L’auteur, Jérémiah Czérivitsky, cinéaste tchèque, nous a confié qu’il était parti d’une adaptation très libre du dernier prix Goncourt, « Trois jours chez ma mère », mais en supprimant toutes les scènes qui auraient pu suggérer le début d’une action. Le héros du roman se demande durant tout le livre s’il ira voir sa mère et dans le film, afin d’atteindre un niveau supérieur de réflexion immobile, le personnage, tout de blanc vêtu, se demande s’il va faire du thé pour sa mère qui va peut-être lui rendre visite. Mais, finalement, sa mère ne vient pas et il ne fait pas de thé. La scène finale où l’on voit cette théière en porcelaine blanche sur le carrelage immaculé, cette théière vide, toujours désespérément vide, est bouleversante.

Ah vraiment, on ne le dira jamais assez, quel film !

Article paru dans le N° 58 962 de mars 2006, de Cinérasage, le mensuel des cinéphiles cultivés.

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Commentaires
J
C'est vrai, Dan, ça ne m'étonne pas de lui !<br /> Le livre, dda, il est partout, et le film, nulle part ! Et il n'est pas prêt d'y être !
D
Merci Pierre, je me note le livre. Le film, il sort quand ??? ;-))
D
Samuel Becket faisait un peu la même recherche.
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