Deux yeux verts...
Deux yeux verts me regardaient…
Chaque nuit je me réveillais en sursaut en hurlant…
Deux yeux verts me regardaient encore alors que j’essayais vainement de me rendormir.
Pendant des années, je n’ai plus osé dormir par crainte de retrouver face à moi cette paire d’yeux verts qui me fouillaient l’âme comme deux yeux de chat terrorisants et inquisiteurs.
Mais ce n’était pas un chat…
C’était une forme humaine assise sur le fauteuil du salon ou de la pièce qui en faisait office et qui jouxtait la cuisine…
J’étais dans la cuisine avec ma tante qui faisait cuire une omelette ou qui, au dessus du fourneau, remuait un ragoût dans une marmite. Et puis, elle me disait d’aller chercher quelque chose dans la pièce à côté.
Cette pièce était plongée dans l’obscurité. Lorsque je cherchais à tâtons l’interrupteur pour allumer la lumière, mon regard rencontrait ces deux yeux verts qui brillaient dans les ténèbres. Je hurlais en appelant ma tante qui accourait en se demandant ce qui se passait. Elle allumait et elle me disait :
— Mais qu’y a-t-il ? Pourquoi as-tu hurlé ainsi ?
Je regardais fixement ce fauteuil vide qui trônait presque au milieu de la pièce…
— Tata, il y avait quelqu’un assis dans le fauteuil…
— Mais enfin, Jean, ne dis pas de bêtises, tu vois bien qu’il n’y a personne…
Je n’insistais pas. Elle prenait ce dont elle avait besoin, éteignait la lumière et me prenait par la main pour me ramener dans la cuisine. Au bout d’un moment, n’y tenant plus, alors qu’elle était de nouveau absorbée dans ses tâches culinaires, je passais la tête dans l’encadrement de la porte de la cuisine pour jeter un œil vers le fauteuil de la pièce à côté.
Et là, immanquablement, je voyais à nouveau les deux yeux verts qui brillaient dans l’obscurité et qui me fixaient…
C’est à ce moment-là que je poussais le cri déchirant qui me réveillait en sursaut…
Texte écrit pour les Impromptus littéraires...